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Le témoignage glaçant d’un survivant de l’enfer musulman de Chine

January 18, 2021

Alors que la répression contre la minorité ouïghoure s’intensifie en Chine, un survivant des camps d’internement réfugié en France livre un témoignage bouleversant. Ce premier témoignage direct nous plonge dans la cruauté de ce que les observateurs appellent un génocide.

Avec “Rescapée du goulag chinois”, Gulbahar Haitiwaji nous plonge dans l’enfer qu’est devenu le Xinjiang pour des millions de musulmans ouïghours. Cette mère ouïghoure vit pourtant en France depuis le milieu des années 2000. Elle a quitté le Xinjiang avec ses deux filles pour rejoindre son mari exilé qui y a trouvé refuge.

En 2016, son ancien employeur l’a convaincue de venir en Chine pour des démarches administratives. En vue de sa retraite, elle a dû signer des papiers. Il était impossible de le faire par procuration, lui a assuré par téléphone le comptable de la compagnie pétrolière qui l’employait depuis 20 ans. Malgré son appréhension, Gulbahar Haitiwaji a décidé de faire le déplacement.

Elle a été arrêtée peu après son arrivée en Chine puis a disparu. Lors de son interrogatoire, la police lui a montré une photo de manifestants ouïghours à Paris, raconte-t-elle. Parmi la foule se trouvait sa fille, Gulhumar, brandissant le drapeau du Turkestan oriental, symbole de l’indépendance ouïghoure. Pour les autorités chinoises, sa fille était donc « une terroriste ». Gulbahar Haitiwaji a réussi à informer sa famille de son arrestation, mais à partir du 29 janvier 2017, plus rien. Pendant six mois, sa famille n’a pas su ce qui lui était arrivé.

Elle passera cinq mois dans les cellules de la police de Karamay, entre interrogatoires et cruautés arbitraires. Elle est ensuite transférée dans une école « construite par le gouvernement pour corriger les Ouïghours, disent-ils ». Il s’agit en réalité du camp Baijiantan, un camp situé en plein désert.

Durant cette absence, elle ignore que sa fille tente de mobiliser l’opinion en France. Elle a publié une pétition signée par près de 500 000 personnes et réclamé la libération de sa mère sur les plateaux de télévision. Un premier procès a condamné Gulbahar Haitiwaji à 7 ans de rééducation. Mais après deux ans, lors d’un procès sommaire en août 2019, un juge de Karamay l’a déclarée innocente.

Nettoyage ethnique méticuleux des Ouïghours

Forte de son expérience, elle a écrit un livre avec la journaliste Rozenn Morgat et publié le 13 janvier. C’est le premier témoignage d’une survivante ouïghoure. L’ancienne prisonnière raconte en détail le déroulement déshumanisant de ses journées. L’objectif, selon elle, est de faire disparaître petit à petit une ethnie musulmane « dans l’indifférence générale ».

Des planches numérotées en guise de lit, un seau pour faire ses besoins, une fenêtre toujours fermée et deux caméras panoramiques. C’est le seul meuble des dortoirs où elle passera son temps de « rééducation ».

Lavage de cerveau 11 heures par jour, autocritique forcée, aveux arrachés, serments d’allégeance répétés matin et soir, pressions physiques et psychologiques sont le lot quotidien des détenus. Pour les femmes, s’ajoutent les stérilisations forcées sous couvert de vaccination. Le tout sous une supervision et des règles militaires. Méfiez-vous de ceux qui bâillent, refusent de manger ou encore ferment les yeux en classe sous peine d’être accusés de prier ou de s’accrocher à leur religion avec pour conséquences des châtiments corporels et des humiliations.

Extraits

“Dans ces camps, la vie et la mort n’ont pas le même sens qu’ailleurs”, écrit Gulbahar Haitiwaji. ” Cent fois, j’ai pensé, lorsque les pas des gardes nous réveillaient dans la nuit, que notre heure était venue. Lorsqu’une main me rasait violemment le cuir chevelu, tandis qu’une autre arrachait les mèches de cheveux tombées sur mes épaules, je fermais les yeux, pensant que ma fin était proche, que je me préparais à l’échafaud, à la chaise électrique et à la noyade. . La mort était omniprésente.

“Quand les infirmières m’ont attrapé le bras pour me “vacciner”, j’ai cru qu’elles m’empoisonnaient. En réalité, ils nous stérilisaient. C’est là que j’ai compris la méthode des camps, la stratégie qui était mise en œuvre : non pas nous tuer de sang-froid, mais nous faire disparaître à petit feu. Si lentement que personne ne le remarquerait.

« Pensaient-ils nous briser avec quelques pages de propagande ? Et puis au fil des jours, la fatigue s’est installée, l’épuisement guettait. J’étais fatigué, tellement fatigué. Je ne pouvais même plus réfléchir. Des journées et des soirées entières à répéter les mêmes phrases creuses qui, jour après jour, abrutissent, effacent les souvenirs, effacent les visages du passé. Personne ne nous a dit combien de temps cela allait durer. »

“Nous sommes des ombres, nos âmes sont mortes. On m’a fait croire que mes proches, mon mari et ma fille, étaient des terroristes. J’étais si loin, si seule, si épuisée et aliénée, que j’ai presque fini par y croire. Mon mari Kerim, mes filles Gulhumar et Gulnigar, je dénonce vos « crimes ».

Peu d’opposition internationale

Depuis plusieurs années, la Chine mène une répression sans merci au Xinjiang, notamment contre sa minorité musulmane ouïghoure. Selon les organisations de défense des droits de l’homme, plus d’un million de musulmans sont détenus dans des camps de rééducation politique.

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